Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : Les Canailloux
  • : C'est la vie et les histoires du canif et du fihuahua.
  • Contact

Recherche

J'aime Ces Blogs !

28 avril 2014 1 28 /04 /avril /2014 12:00

Bonjour à tous ! 

Aujourd'hui, c'est un poème quelque peu particulier que je voudrais partager avec vous.
Il m'a particulièrement marquée à la première lecture. Je le trouve extraordinairement saisissant, et vous comprendrez pourquoi à la fin de votre lecture... 

 

 

Un pauvre honteux

              Il l'a tirée
       De sa poche percée,
       L'a mise sous ses yeux ;
       Et l'a bien regardée
       En disant : "Malheureux !"


              Il l'a soufflée
       De sa bouche humectée ;
       Il avait presque peur
       D'une horrible pensée
       Qui vint le prendre au coeur.


              Il l'a mouillée
       D'une larme gelée
       Qui fondit par hasard ;
       Sa chambre était trouée
       Encor plus qu'un bazar.


              Il l'a frottée
       Ne l'a pas réchauffée,
       A peine il la sentait ;
       Car, par le froid pincée
       Elle se retirait.


              Il l'a pesée
       Comme on pèse une idée,
       En appuyant sur l'air.
       Puis il l'a mesurée
       Avec du fil de fer.


              Il l'a touchée
       De sa lèvre ridée.
       D'un frénétique effroi
       Elle s'est écriée :
       Adieu, embrasse-moi !


              Il l'a baisée,
       Et après l'a croisée
       Sur l'horloge du corps,
       Qui rendait, mal montée,
       De mats et lourds accords.


              Il l'a palpée
       D'une main décidée
       A la faire mourir.
       - Oui, c'est une bouchée
       Dont on peut se nourrir.


              Il l'a pliée,
              Il l'a cassée,
              Il l'a placée,
              Il l'a coupée,
              Il l'a lavée,
              Il l'a portée,
              Il l'a grillée,
              Il l'a mangée.


       - Quand il n'était pas grand, on lui avait dit :
       Si tu as faim, mange une de tes mains.

 

Vapeurs, ni vers ni prose

Xavier Forneret
(1809-1884)

 

Ce poème est poingnant, non seulement en raison de sa chute, tragique et inatendue, mais aussi en raison de son rythme saccadé, créé par la métrique particulière, notamment dans les huit quintils (strophe rare) constitués chacun d'un tétrasyllabe suivi de quatre hexasyllabes. De plus, ce rythme haletant est accentué par les anaphores "Il l'a" au début de chaque quintil, puis à chaque vers du huitain, où toutes les rimes sont identiquement en [e]. Cette répétition, spécialement, instaure une sorte de refrain, de périodicité qui baigne le lecteur dans une atmosphère d'attente de la fin.

Il est nécessaire, une fois qu'est révélée la triste réalité du "repas" de cet homme, de relire le poème une nouvelle fois. On comprend alors les subtilités du jeu de termes qui fait qu'il est à la fois impossible de deviner la chute, et à la fois évident, une fois connue, qu'il s'agit de cela.

 

Malgré l'horreur que provoque la lecture de cette sorte de nouvelle versifiée, j'affectionne tout particulièrement ce poème, que je trouve d'une puissance phénoménale.

 

 

Fihuahua 

Partager cet article
Repost0
11 juin 2013 2 11 /06 /juin /2013 11:00

Pour aujourd'hui, ce sera un extrait d'un magnifique poème de Hugo. Il n'est pas gai du tout, mais je l'adore. Il me serre les entrailles et les émotions qui me parcourent à la lecture sont formidables !

Est-ce spécifique à ma personne ?

 

Les fusillés (extrait)

 

[…] Partout la mort. Eh bien, pas une plainte.

Ô blé que le destin fauche avant qu’il soit mûr !

Ô peuple !

 

On les amène au pied de l’affreux mur.

C’est bien. Ils ont été battus du vent contraire.

L’homme dit au soldat qui l’ajuste : Adieu, frère.

La femme dit : - Mon homme est tué. C’est assez.

Je ne sais s’il eut tort ou raison, mais je sais

Que nous avons traîné le malheur côte à côte ;

Il fut mon compagnon de chaîne ; si l’on m’ôte

Cet homme, je n’ai plus besoin de vivre. Ainsi

Puisqu’il est mort, il faut que je meure. Merci.

Et dans les carrefours les cadavres s’entassent.

Dans un noir peloton vingt jeunes filles passent ;

Elles chantent ; leur grâce et leur calme innocent

Inquiètent la foule effarée ; un passant

Tremble. - Où donc allez-vous ? dit-il à la plus belle.

Parlez. - Je crois qu’on va nous fusiller, dit-elle.

Un bruit lugubre emplit la caserne Lobau ;

C’est le tonnerre ouvrant et fermant le tombeau.

Là des tas d’hommes sont mitraillés ; nul ne pleure ;

Il semble que leur mort à peine les effleure,

Qu’ils ont hâte de fuir un monde âpre, incomplet,

Triste, et que cette mise en liberté leur plaît.

Nul ne bronche. On adosse à la même muraille

Le petit-fils avec l’aïeul, et l’aïeul raille,

Et l’enfant blond et frais s’écrie en riant : Feu ! […]

 

Victor Hugo
(1802-1885) 

 

 

Fihuahua

Partager cet article
Repost0
9 juin 2013 7 09 /06 /juin /2013 11:00

Aujourd'hui, je vous offre un joli petit poème que j'ai découvert très récemment grâce à une amie.

Je l'apprécie beaucoup par sa délicatesse.

 

Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
J'ai chaud extrême en endurant froidure :
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ai grands ennuis entremêlés de joie.

Tout à un coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j'endure ;
Mon bien s'en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.

Ainsi Amour inconstamment me mène ;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.

Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.

 

Louise Labé
(1524-1566)

 

Fihuahua

Partager cet article
Repost0
4 juin 2013 2 04 /06 /juin /2013 11:00

Pour aujourd'hui, ce sera un joli poème de Verlaine, très musical si on le lit à haute voix ! 

 

La lune blanche

La lune blanche
Luit dans les bois ;
De chaque branche
Part une voix
Sous la ramée

Ô bien-aimée.

L'étang reflète,
Profond miroir,
La silhouette
Du saule noir
Où le vent pleure

Rêvons, c'est l'heure.

Un vaste et tendre
Apaisement
Semble descendre
Du firmament
Que l'astre irise...

C'est l'heure excquise.

 

La bonne chanson, 1870

 Paul Verlaine
(1844-1896) 

 

Fihuahua

Partager cet article
Repost0
22 mai 2013 3 22 /05 /mai /2013 11:00

Bonjour ! 
Aujourd'hui, je vous fais découvrir un nouveau poème de Victor Hugo que j'avais particulièrement apprécié à la première lecture, trouvé dans le même recueil que celui du poème n°10.

 

Fêtes de village en plein air


Le bal champêtre est sous la tente.
On prend en vain des airs moqueurs :
Toute une musique flottante
Passe des oreilles aux coeurs.

On entre, on fait débauche
De voir danser en plein midi
Près d'une Madelon point gauche
Un Gros-Pierre point engourdi.

On regarde les marrons frire ;
On est gai, content, berger, roi,
Et, sans savoir comment, superbe,
Et tendre, sans savoir pourquoi.

Feuilles vertes et nappes blanches ;
Le couchant met le bois en feu ;
La joie ouvre ses ailes franches :
Comme le ciel immense est bleu !

 

 

Les chansons des rues et des bois, 1865

Victor Hugo
(1802-1885)

 

 

Fihuahua

Partager cet article
Repost0
20 mai 2013 1 20 /05 /mai /2013 11:00

Aujourd'hui, un joli poème sur les livres, que j'apprécie particulièrement, tiré du recueil Petite anthologie des plus beaux poèmes du bonheur par Claire Julliard, aux éditions L'instant cupcake.

 

 

Nos livres étaient plus vieux que nous

 

Nos livres étaient plus vieux que nous

Nous les feuilletions du regard de peur de casser leurs os

Dans les deux sens pour que les mots s'ébrouent dans l'obscurité

Le livre de botanique nous tenait lieu de potager

Un miroir le dictionnaire qui réfléchit les mots

La mère nous accrochait aux pages pour ne pas nous disperser

Nous cousait ensemble

Le loup nous disait-elle n'est loup que par distraction

Il a la tendresse des neiges au long cours

Et les enfants qui ne connaissaient le loup que par ouïe dire

S'endormaient rassurés dès que la mère secouait son livre pour activer le feu.

 

Vénus Khoury-Ghata
(née en 1937)

 

 

Fihuahua

Partager cet article
Repost0
18 mai 2013 6 18 /05 /mai /2013 11:00

Aujourd'hui, c'est le poème d'un illustre inconnu que je vous propose de découvrir.

Pour changer des grands poètes qui ont marqué les siècles par leur art de l'enchevêtrement des mots et des rimes, je reviens sur un moins connu qui a pourtant écrit de très jolies poésies..

 

Paysage de nuit

 

À Jules Berge.

 

C'est un dimanche soir. Un large clair de lune

Étale son argent sur la grève et la dune.

 

La mer baisse... On entend comme un orgue lointain

Dans la rumeur du flot qui jamais ne s'éteint.

 

Sous le rayonnement de cette nuit paisible

L'œil perçoit jusqu'aux bords de l'horizon visible :

 

Les vieux ormes tordus, les saules sur deux rangs,

Qui des ruisseaux marins contemplent les courants.

 

Ni barques, ni pêcheurs sur les eaux de la Manche,

Car tous les gens de mer honorent le dimanche.

 

Dans le marais voisin encor mal endormi,

Un ruminant couché rouvre l'œil à demi.

 

Il a cru voir le jour... La tête se relève,

Puis tombe... il se rendort en poursuivant son rêve.

 

Sur la grève apparaît nettement de profil

Un personnage errant... tout seul... Où donc va-t-il ?

 

On reconnaît de loin le brave petit homme

Qu'entre les vieux pêcheurs de la côte on renomme.

 

Où va-t-il à cette heure en vareuse et suroît,

Par le plus court chemin de la grève, tout droit ?

 

Sa femme au champ des morts tranquillement repose

À l'ombre de l'église... il s'y rend à nuit close,

 

Et c'est là qu'il s'arrête et vient s'agenouiller

En espérant bientôt près d'elle sommeiller.

 

Chansons des nuits et des berceaux, 1896

André Lemoyne
(1822-1907) 

 

 

Le poète... André Lemoyne :

Andre-Lemoyne-copie-1.jpg André Lemoyne est un poète français né le 27 novembre 1822 et mort le 28 février 1907 à Saint-Jean-d’Angély.

        En 1847, il fut avocat au bureau de Paris, et typographe puis correcteur. De 1848 à 1877, il fut chef de publicité chez Didot. Suite à quoi il devint bibliothécaire de l’École des arts décoratifs.

        André Lemoyne est un des poètes de la liste exposée par Rimbaud dans sa lettre à Paul Demeny, la Lettre du Voyant.

 

 

Fihuahua

 

Source de la biographie : Wikipédia

Partager cet article
Repost0
15 mai 2013 3 15 /05 /mai /2013 11:00

Aujourd'hui, je souhaiterais vous faire partager un poème très connu de mon poète préféré : Arthur Rimbaud.

Je ne saurais pas vraiment dire pourquoi je l'aime bien, mais il me touche à chaque lecture. A vous de voir ce qu'il vous fait ressentir...


 Ophelie_Millais_1851-1852.jpg

      Ophélie  Millais  1883

 

Ophélie

 

Sur l’onde calme et noire où dorment les étoiles
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys,
Flotte très lentement, couchée en ses longs voiles…
On entend dans les bois lointains des hallalis.

Voici plus de mille ans que la triste Ophélie
Passe, fantôme blanc, sur le long fleuve noir ;
Voici plus de mille ans que sa douce folie
Murmure sa romance à la brise du soir.

Le vent baise ses seins et déploie en corolle
Ses grands voiles bercés mollement par les eaux ;
Les saules frissonnants pleurent sur son épaule,
Sur son grand front rêveur s’inclinent les roseaux.

Les nénuphars froissés soupirent autour d’elle ;
Elle éveille parfois, dans un aune qui dort,
Quelque nid, d’où s’échappe un petit frisson d’aile :
Un chant mystérieux tombe des astres d’or.

 

Ô pâle Ophélia ! belle comme la neige !
Oui tu mourus, enfant, par un fleuve emporté !
C’est que les vents tombant des grands monts de Norwège
T’avaient parlé tout bas de l’âpre liberté ;

C’est qu’un souffle, tordant ta grande chevelure,
A ton esprit rêveur portait d’étranges bruits ;
Que ton cœur écoutait le chant de la Nature
Dans les plaintes de l’arbre et les soupirs des nuits ;

C’est que la voix des mers folles, immense râle,
Brisait ton sein d’enfant, trop humain et trop doux ;
C’est qu’un matin d’avril, un beau cavalier pâle,
Un pauvre fou, s’assit muet à tes genoux !

Ciel ! Amour ! Liberté ! Quel rêve, ô pauvre folle !
Tu te fondais à lui comme une neige au feu :
Tes grandes visions étranglaient ta parole
Et l’infini terrible effara ton oeil bleu !

 

Et le poète dit qu’aux rayons des étoiles
Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cueillis,
Et qu’il a vu sur l’eau, couchée en ses longs voiles,
La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys.

 

Recueil de Douai, 1870

Arthur Rimbaud
(1854-1891) 

 

 

Fihuahua

 

Partager cet article
Repost0
12 mai 2013 7 12 /05 /mai /2013 11:00

Bonjour ! Je vous propose aujourd'hui de découvrir un nouveau poème de Victor Hugo.

Il est un peu plus long que les précédents, mais n'en est pas moins beau.

Je vous laisse le découvrir...

 

 

A la mère de l’enfant mort

 

 

Oh ! vous aurez trop dit au pauvre petit ange

Qu'il est d'autres anges là-haut,

Que rien ne souffre au ciel, que jamais rien n'y change,

Qu'il est doux d'y rentrer bientôt ;

 

Que le ciel est un dôme aux merveilleux pilastres,

Une tente aux riches couleurs,

Un jardin bleu rempli de lis qui sont des astres,

Et d'étoiles qui sont des fleurs ;

 

Que c'est un lieu joyeux plus qu'on ne saurait dire,

Où toujours, se laissant charmer,

On a les chérubins pour jouer et pour rire,

Et le bon Dieu pour nous aimer ;

 

Qu'il est doux d'être un coeur qui brûle comme un cierge,

Et de vivre, en toute saison,

Près de l'enfant Jésus et de la sainte Vierge

Dans une si belle maison !

 

Et puis vous n'aurez pas assez dit, pauvre mère,

A ce fils si frêle et si doux,

Que vous étiez à lui dans cette vie amère,

Mais aussi qu'il était à vous ;

 

Que, tant qu'on est petit, la mère sur nous veille,

Mais que plus tard on la défend ;

Et qu'elle aura besoin, quand elle sera vieille,

D'un homme qui soit son enfant ;

 

Vous n'aurez point assez dit à cette jeune âme

Que Dieu veut qu'on reste ici-bas,

La femme guidant l'homme et l'homme aidant la femme,

Pour les douleurs et les combats ;

 

Si bien qu'un jour, ô deuil ! irréparable perte !

Le doux être s'en est allé !... 

Hélas ! vous avez donc laissé la cage ouverte,

Que votre oiseau s'est envolé !

 

 

Les ContemplationsAvril 1843

Victor Hugo
(1802-1885) 

 

 

Fihuahua

 

Partager cet article
Repost0
9 mai 2013 4 09 /05 /mai /2013 21:14

Aujourd'hui, je vous présente un poème que j'ai trouvé en faisant des recherches pour un devoir de français.

Je l'apprécie beaucoup. Il me parle dans sa forme, son originalité, son rythme. Il me touche par son sujet, mais aussi par la manière dont le poète l'a traité. Et vous, qu'en dîtes-vous ?

 


Chrysanthèmes

Sous la mitraille
Chemin tortueux
Dans la grisaille
Pas hasardeux.

Des cicatrices
Larmes de sang
Dans l’interstice
Un être absent.

La mort qui guette
Dans le ciel noir
En fine esthète
Le non-espoir.

Des cris déchirent
La nuit, la vie
La peau transpire
Tout se détruit.

Des chrysanthèmes
Rêves réels
Vie post-mortem
Formes sensuelles.


2008

Christophe Bregaint

 

 

Fihuahua

Partager cet article
Repost0